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L’expérimentation animale, une pratique de plus en plus décriée

22/06/2023

L’expérimentation animale, une pratique de plus en plus décriée

 

L’expérimentation animale n’est pas récente sur l’échelle de l’Histoire. Pendant l’Antiquité, Aristote effectuait des expériences sur des singes et des porcs. Néanmoins, c’est au XIXème siècle que cette pratique se développe et devient systématique par le biais de Claude Bernard, considéré comme le fondateur de la médecine expérimentale.

 

Depuis quelques années, les citoyens sont de plus en plus sensibles au bien-être animal. En effet, dans un récent sondage effectué par l’IFOP pour la Fondation 30 Millions d’Amis, 90 % des Français sont favorables à l’interdiction de l’expérimentation animale dans le cas où une méthode alternative peut être mise en place. En revanche, pour d’autres, cette pratique est un mal nécessaire pour faire avancer la recherche scientifique afin de protéger la santé des humains.

 

Une activité barbare peu transparente

 

D’après le dernier rapport publié par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche relatif à l’utilisation d’animaux à des fins scientifiques dans les établissements français, un peu plus d’1,8 millions d’animaux ont été utilisés pour la recherche scientifique en 2021. Ce chiffre est en nette augmentation par rapport à 2020 avec 200 000 animaux de plus. Sur l’ensemble de la population testée, les rongeurs sont largement présents : la souris (61%), le lapin (9%) et le rat (9%). Terme un peu flou, la recherche fondamentale est la première raison de l’expérimentation animale (38%). L’objectif, ici, est d’accroître les connaissances relatives aux sciences de la vie. Seuls 28 % des animaux utilisés le sont pour des raisons réglementaires. Non évoquée dans ce rapport, et moins connu du grand public, la recherche militaire utilise également des animaux pour tester notamment de nouvelles armes afin d’analyser la résistance du corps à celles-ci.    

           

Malgré ce rapport, le secteur de l’expérimentation reste globalement opaque sur ses activités. En effet, lorsqu’un consommateur achète un produit, aucune mention des tests effectués sur les animaux est présente. Par ailleurs, aux yeux des citoyens, cette pratique rime avec « recherche pour les médicaments ». La vérité est tout autre, car son champ d’opération est bien plus large. A titre d’exemple, beaucoup de produits ménagers ont été testés sur les animaux avant leur commercialisation. Un des tests effectués, pour les détergents notamment, est la pulvérisation du produit dans les yeux de lapins. D’autres expériences absurdes ont lieu dans les laboratoires, comme le fait de forcer des singes via des décharges électriques à se maintenir sur un siège malgré l'inhalation de poison. Pourtant, d’autres méthodes sans animaux existent et fonctionnent, telles que la simulation informatique (in silico) ou encore les expériences in vitro correspondant à des puces contenant une culture de cellules humaines.

 

Maltraitance animale et failles scientifiques

 

Les médias relaient de plus en plus les investigations des associations et des ONG, mettant en lumière la maltraitance des animaux dans les laboratoires. En 2019, L214 publie une enquête choquante sur les vaches à hublot. Toujours d’actualité, cette expérience a un objectif purement économique puisqu’elle a pour vocation de comprendre le fonctionnement de ces ruminants afin d’augmenter leur productivité. Autre exemple, depuis plusieurs années, One Voice demande à Air France d’arrêter le transport de singes vers les laboratoires européens et américains. Combat de longue haleine, la compagnie aérienne a indiqué qu’elle arrêtait cette activité cette année. Aussi, une enquête fédérale est en cours contre la société Neuralink appartenant à Elon Musk. La start-up aurait enfreint la loi sur la protection animale en tuant 1 500 animaux. L’expérience consistait à leur implanter des puces électroniques dans le cerveau.

 

Cette pratique scientifique présente de sérieuses failles car il y a peu d’éléments amenant la preuve que des essais sont favorables aux humains. D’après une étude de la société pharmaceutique Pfizer, «  seulement 5 à 25 % des substances nocives pour l’être humain ont aussi des effets négatifs sur les animaux de laboratoire ». Ainsi, dans le cadre de l’utilisation d’un médicament, celui-ci peut provoquer des effets secondaires chez les humains et, a contrario, aucun sur les animaux. A titre d’exemple, en 2011, malgré le « succès » des tests opérés sur les animaux, le Butazolidine, traitement contre les rhumatismes, n’est plus commercialisé car ce traitement provoquait de graves effets secondaires sur les humains.

 

Bientôt une avancée juridique majeure ?

 

La directive européenne 2010/63/UE, applicable en France depuis 2013, indique qu’il faut « remplacer l’expérimentation animale dès que possible » . En apparence, il s’agit d’une avancée. En pratique, cette directive implique peu de bouleversements majeurs du fait notamment de la résistance au changement des laboratoires, du coût plus élevé des méthodes alternatives et de la position des institutions européennes considérant l’utilisation d’animaux comme « nécessaire pour protéger la santé humaine, la santé animale et l'environnement ». Première réelle avancée, depuis mars 2013, il est interdit de vendre des cosmétiques testés sur les animaux sur le sol européen. Toutefois, cela ne garantit pas la non expérimentation animale d’un des ingrédients faisant partie de la composition d’un produit cosmétique.  

 

Plus récemment, en 2021, une initiative citoyenne européenne (ICE) lancée par plusieurs organisations agissant pour la défense des animaux a recueilli plus d’un million signatures. L’objectif est d’interdire progressivement toute expérimentation animale au sein des pays de l’Union européenne. La Commission européenne doit se prononcer sur le sujet le 25 juillet prochain. Affaire à suivre, croisons les doigts.

 

Envie d’aller plus loin ?

 

Les podcasts LVDA#50 « Offrir une belle vie après le labo » avec Julie Bienvenu, White Rabbit

et LVDA#46 « Parlons Science » avec André Menache, Conseiller Scientifique pour Antidote et Pro Anima

L’ouvrage d’Audrey Jougla – Profession : animal de laboratoire (LVDA#14)

Le reportage d’Envoyé spécial (France 2) « Recherche : le sacrifice des singes »

 

Par Caroline.C

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